Il y a cinq ans, Christopher Nolan s’opposait à Warner Bros. pour sauver les salles de cinéma

Image d'illustration. TenetWarner Bros. / PR-ADN
Il y a cinq ans, Christopher Nolan entrait en désaccord avec Warner Bros. dans l’espoir de préserver la fréquentation des salles de cinéma, à un moment où l’industrie faisait face à de profonds bouleversements.
Tl;dr
- Tenet a marqué la rupture entre Nolan et Warner Bros.
- La sortie du film, en pleine pandémie, a bouleversé l’industrie.
- Le débat cinéma/streaming s’est cristallisé autour de cette sortie.
Un pari risqué au cœur de la pandémie
C’était l’une des grandes énigmes de 2020 : comment relancer le box-office mondial alors que les salles fermaient les unes après les autres ? Pour Christopher Nolan, il n’était pas question de céder à la facilité du streaming. Avec son blockbuster à 205 millions de dollars, Tenet, le réalisateur voulait ranimer la magie du grand écran. À l’époque, Hollywood semblait pris au piège d’une alternative : attendre ou tout miser sur la VOD. Pourtant, alors que des productions comme « Trolls World Tour » fonçaient directement vers le numérique, Nolan tenait bon.
La position du cinéaste s’est toutefois vite heurtée aux inquiétudes de son studio fétiche, Warner Bros.. La sortie prévue pour juillet fut reportée à plusieurs reprises, suscitant tensions et négociations. Pendant ce temps, l’industrie entière observait – certains redoutaient même une extinction pure et simple des salles obscures.
Le coup d’envoi et ses conséquences inattendues
Quand enfin Tenet a débarqué en salle, d’abord timidement fin août sur un nombre restreint d’écrans américains, puis plus largement début septembre, les résultats ont laissé perplexe. Certes, le film s’est hissé plusieurs semaines en tête du box-office, mais avec des chiffres historiquement bas : seulement 59 millions de dollars aux États-Unis et un total mondial de 366 millions – loin des attentes pour amortir un tel investissement.
Face à cette situation sans précédent, le marché a tenté de s’adapter :
- Nolan refusait catégoriquement un passage direct en streaming.
- Warner Bros., soucieux de rentabiliser son pari, exigeait une part accrue des recettes.
- Pendant ce temps, la piraterie prospérait faute d’alternatives légales dans certains pays.
Cette combinaison d’incertitudes a brouillé toute lecture habituelle du succès ou non du film.
L’après-Tenet : divorce consommé et débat ravivé
Le vrai tournant survient cependant quelques mois plus tard. En décembre 2020, l’annonce fracassante de « Project Popcorn » par Warner Bros., prévoyant la sortie simultanée sur HBO Max et en salle pour tous leurs films en 2021, mettra le feu aux poudres. Très remonté, Nolan dénonce publiquement ce choix : « Certaines des plus grandes figures du cinéma se sont réveillées en découvrant qu’elles travaillaient pour le pire service de streaming ! » Ce désaccord marque la fin d’une alliance historique. Loin de se laisser abattre, Nolan rejoint alors Universal. Son film suivant, « Oppenheimer », triomphe au box-office et décroche l’Oscar.
Bilan incertain pour l’industrie et perspectives floues
Cinq ans après sa sortie mouvementée, difficile encore de trancher sur l’héritage réel de Tenet. D’un côté, il n’a pas été le succès financier espéré ; mais il a montré qu’une certaine envie subsistait pour le cinéma en salle – un message dont l’importance dépasse les simples recettes. Depuis lors, la reprise reste timide : jamais l’industrie n’a retrouvé son niveau d’avant crise sanitaire. Dans cet entre-deux fragile où studios hésitent entre expérience collective et logique numérique pure, l’histoire de Tenet demeure emblématique des dilemmes actuels du septième art.