Le génie caché derrière la stratégie marketing déroutante de Une bataille après l’autre

Image d'illustration. One Battle After AnotherGhoulardi Film Company / PR-ADN
La stratégie marketing de Une bataille après l'autre, bien que déroutante à première vue, a su capter l’attention du public et susciter la curiosité. Cette approche inattendue pourrait finalement s’avérer être un choix particulièrement judicieux.
Tl;dr
- Film politique sur révolution et suprématie blanche américaine.
- Promotion marketing floue, mais stratégiquement efficace.
- Mélange de noirceur, humour et espoir familial.
Un film à la fois radical et profondément humain
À l’heure où les tensions politiques atteignent leur paroxysme outre-Atlantique, « Une bataille après l’autre« s’impose comme une œuvre cinématographique aussi engagée qu’ambitieuse. Réalisé par Paul Thomas Anderson, le film plonge sans détour dans la lutte opposant le groupe révolutionnaire fictif des French 75 aux dérives extrêmes du gouvernement des États-Unis. À la tête de ce mouvement, on retrouve un Leonardo DiCaprio habité, incarnant un Pat Calhoun prêt à tout pour défendre les opprimés. Son alter ego maléfique, campé par Sean Penn, dirige quant à lui une sinistre organisation suprémaciste : le fameux Christmas Adventurer’s Club, dont le salut entre membres – « Hail St. Nick » – fait froid dans le dos.
L’art de la promotion : entre opacité et génie stratégique
En marge de la sortie, beaucoup se sont interrogés sur la campagne marketing menée par Warner Bros.. Les bandes-annonces restaient énigmatiques, révélant peu sur l’intrigue ou la portée politique du film. Plus surprenant encore, un partenariat improbable avec Fortnite, proposant d’incarner les personnages du long-métrage alors même que le public n’en connaissait guère plus que leurs silhouettes. Les apparitions inattendues de DiCaprio et Benicio del Toro dans un podcast sportif – loin des sphères cinéphiles habituelles – ont renforcé cette impression d’improvisation… ou de calcul brillant.
Cette stratégie n’a rien d’anodin : en évitant toute communication frontale sur les thèmes brûlants du film – crise migratoire, droits reproductifs bafoués, montée des discours suprémacistes –, le studio semble avoir préféré laisser la conversation émerger naturellement à la sortie en salles.
Noirceur contemporaine, humour corrosif et espoir familial
Loin de n’être qu’un brûlot politique, « Une bataille après l’autre » ose jongler avec plusieurs registres : satire acerbe, suspense nerveux et même émotion familiale. Le spectateur suit Pat (rebaptisé Bob Ferguson) non seulement dans ses luttes collectives, mais aussi dans sa quête personnelle pour retrouver sa fille Willa. Cette dynamique père-fille apporte au récit une dose salutaire d’humanité. Malgré l’âpreté des scènes – telle l’ouverture explosive où les French 75 renversent un centre de détention d’immigrés à San Diego –, le film se distingue par ses pointes d’humour mordant et une énergie narrative irrésistible.
Les amateurs d’action ne seront pas déçus : fusillades tendues, infiltration d’organisations extrémistes et rebondissements sont au rendez-vous. Mais c’est bien cette tension entre désespoir politique et envie tenace de croire en l’avenir qui confère à l’ensemble sa force cathartique.
Derrière l’épopée révolutionnaire, un miroir de notre époque
Porté par une distribution magistrale – mention spéciale à la révélation Chase Infiniti, bouleversante en Willa –, « Une bataille après l’autre » résonne comme un cri lucide sur l’état actuel de nos sociétés occidentales. Entre chaos institutionnel et résistances individuelles, il invite chacun à s’interroger : jusqu’où sommes-nous prêts à aller pour défendre ce qui nous paraît juste ?
Le film est désormais projeté dans les cinémas partout en France.