Première historique : Bullish lève 1,15 milliard de dollars en stablecoins et entre à Wall Street

Image d'illustration. Bitcoins et cryptomonnaiesADN
Le 14 août dernier, la Bourse de New York a été le théâtre d’une première, et on peut regretter que sa couverture médiatique n’ait pas été à la hauteur de son caractère historique.
- Bullish devient la première entreprise à réaliser son introduction en Bourse en offrant ses actions uniquement contre des stablecoins
- L’USDC et l’EURC de Circle, le RLUSD de Ripple, le PYUSD de PayPal/Paxos, l’USDCV et l’EURCV de Société Générale-FORGE ont été utilisés, entre autres
- L’action a bondi a quasiment doublé lors du premier jour de cotation, valorisant l’entreprise à plus de 10 milliards de dollars
Bullish, bourse d’échange de cryptomonnaies très prisée des institutions américaines, est entrée en Bourse au NYSE. Mais pas n’importe comment, puisqu’elle a réuni uniquement des investisseurs décidés à régler leurs achats d’actions en stablecoins… plutôt qu’en dollars traditionnels.
Une méthode inédite, et qui valide enfin le fait que la récente loi GENIUS Act permet aux entreprises crypto-natives – courtiers et exchanges, fonds d’investissement, traders professionnels – de participer directement avec leurs actifs numériques. On signalera la présence de Circle, l’émetteur du stablecoin USDC utilisé dans l’opération, qui avait lui-même choisi la voie “classique” avec règlement en dollars quelques mois auparavant pour son arrivée en Bourse au NYSE.
Une introduction en Bourse qui parle le langage crypto
Une IPO (pour “initial public offering”), c’est quand une entreprise privée vend pour la première fois ses actions au grand public. Habituellement, le processus suit la règle du T+2 (transaction plus deux jours) : les investisseurs achètent les actions aujourd’hui, mais le règlement effectif, l’échange argent contre titres, se fait deux jours ouvrables plus tard, le temps pour les banques de vérifier les fonds et de transférer les actions.
Bullish est sortie de ce schéma. Au lieu d’exiger des virements traditionnels soumis au T+2, l’entreprise a accepté des stablecoins, ces cryptomonnaies dont la valeur reste ancrée à 1 dollar grâce à des réserves en monnaie fiduciaire (dollars réels détenus en banque). C’est une approche typique du secteur crypto que l’on retrouve donc pour la première fois utilisée à Wall Street.
Jusqu’ici, les sociétés d’investissement du Web3 devaient convertir leurs avoirs en dollars traditionnels, payer des frais de change, attendre les délais de règlement. Avec Bullish, ils ont pu utiliser directement leurs USDC et autres stablecoins, avec un règlement quasi-instantané sur la blockchain.
Les avantages rappellent ceux observés dans d’autres secteurs. Les casinos en ligne, par exemple, acceptent tous les paiements en stablecoins pour les dépôts de leurs joueurs, car ceux-ci sont beaucoup plus rapides que les autres méthodes traditionnelles. Il suffit de quelques secondes pour déposer des USDC sur le réseau Solana sur son compte joueur, contre plusieurs heures (voire jours) pour un virement bancaire.
1,15 milliard de fonds levés, essentiellement en USDC sur le réseau Solana
Pour cette opération historique, Bullish a accepté une diversité de stablecoins. Le principal a été l’USDC de Circle, transporté majoritairement sur le réseau Solana pour des raisons évidentes de coût et de vitesse.
Les investisseurs européens ont utilisé l’EURC, la version euro de Circle, tandis que d’autres ont opté pour le PYUSD de PayPal (émis techniquement par Paxos) ou le tout nouveau RLUSD de Ripple, lancé en décembre dernier.
Plus surprenant, même les stablecoins de Société Générale (émis par sa filiale FORGE) ont été utilisés, les jetons USDCV et EURCV. Au total, neuf stablecoins différents ont été acceptés, démontrant que l’infrastructure crypto peut désormais gérer la complexité d’une opération boursière.
Assouplissement réglementaire et vague d’introductions en Bourse de sociétés crypto-natives
Bullish n’est pas une entreprise crypto ordinaire. Lancée en 2021, c’est une bourse d’échange destinée aux professionnels : banques, fonds d’investissement, grandes entreprises. Son dirigeant, Tom Farley, a présidé la Bourse de New York de 2014 à 2018 avant de rejoindre le monde crypto.
L’entreprise gère déjà plus de 1,6 milliard de dollars de transactions quotidiennes. Parmi ses actionnaires : Peter Thiel (cofondateur de PayPal), Mike Novogratz (Galaxy Digital) et plusieurs grandes institutions financières. Cette introduction en Bourse visait plusieurs objectifs : lever des capitaux pour se développer, gagner en crédibilité auprès des institutions traditionnelles, et permettre aux investisseurs de la première heure de vendre une partie de leurs actions.
Bullish visait initialement 629 millions de dollars, mais a finalement levé 1,15 milliard. Le prix de l’action était fixé à 37 dollars a été largement dépassé puisqu’à la cloche, le titre a ouvert sa cotation à 68 dollars, touchant même brièvement les 118 dollars en séance. Au moment de ces lignes, il navigue confortablement au-dessus des 60 dollars.
Après le vote de la loi fédérale GENIUS Act à la mi-juillet (donnant un cadre clair aux cryptos stables) et un assouplissement général vis-à-vis des cryptos aux États-Unis, d’autres entreprises crypto se préparent pour leur entrée à Wall Street. C’est le cas de Kraken en 2026.