Le Dune de David Lynch a été validé par Frank Herbert

Image d'illustration. DuneDino De Laurentiis Corporation / PR-ADN
Contrairement à bien des auteurs, Frank Herbert saluait l’adaptation de Dune par David Lynch, malgré ses imperfections.
Tl;dr
- Frank Herbert adopte une position nuancée sur les adaptations, saluant celle de Dune par David Lynch pour avoir préservé l’essence de l’histoire.
- Il loue particulièrement la puissance visuelle du film, fruit de choix artistiques audacieux assumés par le réalisateur.
- Malgré des limites narratives et politiques, l’adaptation reste une œuvre singulière qui continue de diviser et de fasciner.
L’appréciation nuancée de Frank Herbert
Difficile d’évoquer les adaptations sans aborder la sempiternelle question de la fidélité à l’œuvre originale. Souvent, les fans souhaitent une reproduction quasi exacte du livre, au risque de considérer toute liberté artistique comme une trahison. Pourtant, l’histoire regorge d’exemples contrastés : si Stephen King n’a jamais caché son aversion pour The Shining, d’autres, à l’instar de Chuck Palahniuk, ont même préféré la version cinématographique de leur roman.
Dans cette mosaïque d’avis, la réaction de Frank Herbert, père du mythique Dune, détonne encore aujourd’hui. En 1984, lors de la sortie du film signé David Lynch, le romancier surprend en saluant l’adaptation, malgré une réception critique très tiède. Son constat ? « L’histoire est là. Ils ont sauvé l’histoire. C’est ce qui compte pour l’auteur », confiait-il à Entertainment Tonight, soulignant l’habileté de David Lynch dans le choix des métaphores visuelles.
David Lynch et le pari des images fortes
S’il fallait retenir une seule réussite majeure du film, ce serait indéniablement sa dimension visuelle. Sous la houlette de David Lynch et du chef décorateur Anthony Masters, les paysages étranges et les personnages singuliers prennent vie avec une audace rare à Hollywood à cette époque. Les fameux navigateurs mutants illustrent particulièrement bien cette liberté créative assumée — et validée par Herbert lui-même : « Pourquoi ne pas améliorer le sens visuel du film ? Et ils en ont toute latitude. »
Limites et regrets autour de l’adaptation
Toutefois, il serait simpliste de ne voir que les aspects positifs. Le film souffre d’un manque flagrant sur le plan politique : la complexité machiavélique qui fait tout le sel du roman disparaît derrière un récit plus manichéen. Autre point notable : l’absence au montage final d’une séquence clé — un banquet central où se cristallisent toutes les tensions politiques — a laissé Frank Herbert sur sa faim. Il comprenait néanmoins les contraintes imposées par le format cinématographique.
Entre singularité visuelle et entorse narrative
Certes, certains reprochent encore au long-métrage d’occulter la mise en garde contre le culte messianique chère au livre, ou bien de réduire Paul Atréides à un héros sans ambigüité morale. Mais force est de reconnaître qu’à travers ses choix radicaux, David Lynch a su donner naissance à une adaptation dense, étrange et résolument unique dans l’univers cinématographique. Un pari osé qui continue, quarante ans après sa sortie, d’alimenter débats… et passions chez les amateurs de science-fiction comme chez les puristes du roman original.