Hello Tomorrow Challenge 2014, vive l’innovation !
La Cité des Sciences et de l’industrie vient accueillir les esprits les plus brillants qui créent le monde de demain. Nous étions sur place.
A quoi ressemblera l’avenir ? Entre conjectures de futurologues ou de joyeux illuminés, difficile de s’y retrouver. Les réunions technologiques actuelles n’offrent que des vues parcellaires, surtout en France. Soit elles se cantonnent à un domaine particulier (robotique, informatique, biologie…), soit elles sont purement théoriques (détachées des besoins et de l’économie).
La création du Hello Tomorrow Challenge
Partant de ce constat, Xavier Duportet, doctorant MIT-INRIA, a eu le projet fou de rassembler le meilleur de l’innovation technologique pour apporter un état de l’art en la matière. Il s’est inspiré du concours d’innovation MIT100K organisé par le célèbre Institut de technologie du Massachussetts pour créer le Hello Tomorrow Challenge. Lors du First Day of Tomorrow, de grandes conférences étaient données par des experts en intelligence artificielle, microélectronique, nanoparticules, biotechnologies, médecines pour montrer l’avancement actuel des recherches et leurs possibles applications. Parallèlement, 25 start-ups (sur près de 1200 candidatures de 48 pays) présentaient en quelques minutes leurs travaux devant un public d’investisseurs et technophiles attentifs.
Quoi de neuf pour demain ?
Sans sombrer dans l’optimisme niais, la R&D (recherche et développement) porte de beaux projets. Pour le docteur Giovanni Salvatore (scientifique au département Wearable Computing Group à École polytechnique fédérale de Zurich), le silicium peut s’étirer, se dissoudre. L’électronique sera sur et sous la peau ou même sous forme de lentille.
Pour Max Versace (directeur du Neuromorphic Lab à l’université de Boston), la technologie a déjà permis d’étendre les capacités de l’homme, notamment son corps et son esprit. Les recherches doivent désormais développer son cerveau. Jusqu’ici, on s’acharne à modifier la fréquence d’horloge des processeurs mais l’avenir est dans la multiplication des cœurs (cores) pour les fondeurs. Mieux encore, un projet américain (The Brain Initiative) et européen (The human Brain Project) investi respectivement 300 millions et 100 millions de dollars sur 10 ans pour concevoir un cerveau électronique. On ne parlerait plus d’un CPU (Central Unit Processor) mais d’un NPU (Neuronal Unit Processor), capable de comprendre et d’apprendre comme nos petites cellules grises.
Pour Massimo Banzi (co-fondateur d’Arduino), le projet Arduino (plateforme de prototypage électronique) a suscité une effervescence de créativité. Des drones, des sondes bon marché, des imprimantes 3D auto-répliquantes (qui permettent d’en fabriquer d’autres), des analyseurs d’objets (comme le Tricorder dans Star Trek) et une myriade d’autres projets ont vu le jour avec Arduino. Les passionnés d’électroniques ou les débutants en programmation peuvent concevoir les objets de demain ou simplement s’amuser en apportant leur pierre à l’édifice.
« Tant qu’il n’y a pas de feu ou de composants grillés, vous apprenez quelque chose » explique Massimo Banzi
Et pour les biotechnologies ?
A la frontière entre biotech et robotiques, le chirurgien dentiste mais aussi spécialiste en impression 3D, Andrew Dawood a prouvé que ce dernier domaine pouvait aussi bien décupler les possibilités de créations artistiques que « réparer » le corps humain. En prenant l’exemple d’un homme défiguré par une maladie, le docteur a démontré que les technos actuelles peuvent déjà aider des personnes souffrant de pathologies lourdes, et ce pour un cout extrêmement plus faible que les méthodes conventionnelles.
En biotechnologies, les nanotechnologies ont le vent en poupe. En encapsulant un médicament dans une nanoparticule, le professeur Patrick Couvreur est en voie de soigner le cancer du poumon. Les cobayes supportent presque deux fois mieux ce traitement à l’échelle moléculaire que les chimios classiques. Pour une application à taille humaine, il faudra cependant attendre encore quelques années.
Avec une démographie qui explose à l’échelle mondiale et parallèlement les ressources qui se raréfient (eau, terres cultivables…), les craintes de malnutrition pointent sur des pays comme la Chine ou l’Inde. La viande est riche en protéines mais nécessite beaucoup plus de temps, d’eau et rejette plus de déchets que la culture de végétaux. Pour le professeur Mark Post (chercheur département de physiologie à l’université de Maastricht), l’avenir est dans la viande in vitro. En multipliant des cellules de muscle, on peut fabriquer de la viande de manière artificielle. Si le gout n’est pas encore optimal, un sondage montrait que les hollandais étaient prêts à manger de la viande in vitro. Mark Post estiment même qu’une machine à viande pourrait faire partie de l’équipement de la cuisine de monsieur et madame tout le monde dans quelques années. Il fantasme même à l’idée de manger du bison-lapin, du flamand-girafe avec un subtile mélange de cellules ! Mais cette fabrication est pour l’heure onéreuse. De l’ordre de 65 dollars le kilo. Il espère que dans 10 ans, le prix soit divisé par 10.
Le Hello Tomorrow Challenge
Pour favoriser le développement et les efforts sur des projets innovants, le Hello Tomorrow Challenge a récompensé une start-up par un chèque de 15 000 euros, dans cinq disciplines différentes :
- Prix de l’énergie, offert par Total : Watch Live electro Chemistry.
Manuel Ausserre accompagné de son père (chercheur au CNRS) sont parvenus à créer une sorte de microscope pour étudier en temps réel le fonctionnement des batteries, pour améliorer leur rendement, raccourcir leur temps de charge, alléger leur poids notamment.
- Prix des biotechnologies/médecine, offert par Inserm Transfert : G-Therapeutics.
L’entreprise française vise à faire marcher des personnes paraplégiques. Des tests sur des souris et des humaines ont démontrés déjà quelques succès.
- Prix du big data, offert par AXA : Carbon Analytics.
Cette société anglaise évalue l’empreinte carbone des entreprises avec un logiciel qui analyse leurs diverses dépenses.
- Prix hardware/robotique, offert par Airbus : Gimball.
Des étudiants de l’école polytechnique fédérale de Lausanne ont mis au point un drone enchassé dans une cage en fibre de carbone. Ainsi il peut se mouvoir dans n’importe quel environnement dangereux (toxique, incendie, effondrement de bâtiments…) et accessoirement joué Quidditch au comme dans Harry Potter ! Les concepteurs ont étudiés les collisions de mouches contre les vitres pour élaborer cet engin.
- Prix IT/com, offert par Orange : SteamRoot.
Le trio français Pierre-Louis Théron, Nikolay Rodionov et Axel Delmas ont mis au point un moyen pour lire sans coupure (et sans installation de plugin) nos vidéos en streaming. Plutôt que de lire depuis une plateforme unique (exemple YouTube), l’internaute télécharge de manière transparente depuis d’autres internautes, en peer to peer. Pour l’heure, la technologie réduit la bande passante de 70% environ mais peut monter à 90%.
- Grand prix de 100 000 dollars, offert par : G-Therapeutics.
La roadmap de G-Therapeutics espère débuter les premières commercialisations fin 2018.
Pour un premier évènement, le First Day of Tomorrow 2014 a donné un coup de fouet aux entreprises et initiatives innovantes méconnues. L’optimisme et le partage étaient à l’honneur à la Cité des Sciences et de l’Industrie. Pour Joel de Rosnay (président Biotics International et surtout expert en nouvelles technologies) et Xavier Duportet, on avait pas vu pareil dynamisme en France depuis longtemps.