What.cd : la plus grande discothèque numérique au monde ferme ses portes
Une opération du centre de lutte contre les criminalités numériques a permis de mettre fin aux activités illégales du plus grand — et peut-être le plus discret — des trackers privés consacrés à la musique.
Hier soir, un étrange et rare phénomène s’est produit dans la presse : suite à un billet de nos confrères français de Zataz, la presse tech américaine s’affole et relaye une actualité. On est plus habitué à voir ce phénomène dans l’autre sens, mais l’origine du sujet n’y est pas pour rien. Hier, what.cd, un pilier du téléchargement illégal, a été fermé suite à la saisie de serveurs dans différents data centre du Nord de la France (dont certains fait sont aujourd’hui contestés).
Un coup de filet majeur
L’opération menée hier par le centre de lutte contre les criminalités numériques (C3N) est l’aboutissement de deux ans de travail, selon Zataz. Les serveurs mails, IRC et trackers du site ont été saisis dans plusieurs data centre OVH du Nord de la France (Lille, Roubaix mais aussi Gravelines). D’abord simple rumeur, il n’a pas fallut attendre longtemps pour recevoir via Twitter la confirmation de la fermeture du site, toujours en ligne quoique non fonctionnel, par l’équipe de what.cd (apparemment) installée au Royaume-Uni.
Due to some recent events, What.CD is shutting down. We are not likely to return any time soon in our current form. 1/2
— What.CD (@whatcd) November 17, 2016
Les administrateurs du site précisent dans un second tweet que l’ensemble des données personnelles du site ont été détruites, surement via la destruction des clés de cryptage protégeant les serveurs :
All site and user data has been destroyed. So long, and thanks for all the fish. <3 2/2
— What.CD (@whatcd) November 17, 2016
Le Graal des mélomanes
what.cd, fondé sur les cendres de feu OiNK comme son confrère Waffles.fm, est devenu en neuf ans la plus grosse bibliothèque numérique illégale au monde. Près de trois millions de torrents étaient proposés en téléchargement, des derniers hits aux — surtout — contenus les plus confidentiels et obscurs, what.cd se reposait sur une communauté triée sur le volet à partir d’entretiens réalisées via IRC. C’est seulement suite à un questionnaire sur le téléchargement, l’upload, les formats musicaux et plus encore que l’utilisateur était autorisé (ou non) à rejoindre la communauté. Un utilisateur pouvait également être invité par un autre via cooptation.
Plus qu’un site hermétique, what.cd était avant tout le Graal de tous les mélomanes et auditeurs pointus, autant pour son contenu rare et inédit que pour son interface qui regroupait les albums, EP, singles, remixes et live, voire soundboard de milliers d’artistes, le tout organisé selon nombre d’éditions différentes — what.cd était le site où il était possible de trouver des rips de vinyles bien spécifiques, classés selon les années et les pays, voire selon les mastering (MFSL, MOV). Un point d’honneur était mis sur la qualité des “rips”, le site accusant des centaines de milliers de torrents de fichiers FLAC et lossless, du 16-bit/44 KHz (Redbook) jusqu’au 32-bit/192KHz.
Une fermeture inéluctable
Si sa disparition était inévitable — et bien qu’elle mit longtemps à arriver, elle est regrettable dans le sens où la loi, qui doit prévaloir, à l’évidence, l’emporte sur la culture elle-même, sur un héritage musical mondial et la force d’une scène alternative qui avait déployé des moyens considérables pour s’ériger en véritable bibliothèque d’Alexandrie de la musique, dépassant le cadre national de l’opération qui doit son origine à des plaintes de la SACEM.
Adrienne Charmet, coordinatrice des campagnes de la Quadrature du Net, déplore sur Twitter la mort d’un “trésor” :
https://twitter.com/AdrienneCharmet/status/799405962910175232
https://twitter.com/AdrienneCharmet/status/799406802379165696
https://twitter.com/AdrienneCharmet/status/799408613877948416