Test DropMix

Par Nerces publié le 4 décembre 2017 à 11h30, modifié le 4 décembre 2017 à 14h07.
Pop Culture

Créateur de Guitar Hero, Rock Band et Dance Central, Harmonix revient sur le devant de la scène avec un jeu musical novateur. DropMix propose de jouer les DJ en mixant jeu vidéo, jeu de plateau et jeu de cartes à collectionner. Un mix façon bonne pioche pour le studio ?

5 /10

Notes

  • DropMix
    5

Avantages

  • Concept de mixage génial
  • Des mixes bien fichus...
  • Fonctionnement plug & play
  • Amusant...
  • Trois modes de jeu

Inconvénients

  • Discographie très limitée
  • ... mais très inégaux
  • Modèle économique détestable
  • ... mais pas sur le long terme
  • Seulement des extraits
  • Quelques bugs d'appairage

Créateur de Guitar Hero, Rock Band et Dance Central, Harmonix revient sur le devant de la scène avec un jeu musical novateur. DropMix propose de jouer les DJ en mixant jeu vidéo, jeu de plateau et jeu de cartes à collectionner. Un mix façon bonne pioche pour le studio ?

Introduction

Milieu des années 2000, Harmonix lance Guitar Hero. S’il reprend le principe du GuitarFreaks de Konami, le studio américain fait franchir un cap à ce type de jeu musical. Les épisodes se sont alors enchaînés, le divorce d’avec Activision a suivi, puis le mariage avec Electronic Arts et la réussite d’un fils spirituel, Rock Band. Le virage des années 2010 a été plus compliqué à prendre et Harmonix s’est associé à Mad Catz pour faire renaître la franchise Rock Band. Hélas, le constructeur n’avait pas les reins assez solides. Aujourd’hui, c’est avec un plus gros partenaire qu’Harmonix fait équipe : avec Hasbro, il vise un public plus large, moins geek, et lance DropMix.

Pour mixer... all night long

À la rencontre de multiples influences, DropMix est aussi bien un jeu vidéo qu’un jeu de cartes à collectionner et un jeu de plateau. Cette « Sainte Trinité » est évidemment ce qui fait la force de DropMix et lui permet de viser un public très étendu. Cependant, nous verrons que c’est aussi ce qui fait sa grande faiblesse : à vouloir rallier tous les suffrages, Harmonix ne trouve jamais sa véritable cible et perd de sa puissance. Mais revenons-en au concept qui caractérise ce titre pour le moins singulier. DropMix se compose donc d’une console sur laquelle sont disposées cinq « cases ». Celles-ci agissent comme autant de pistes sonores pour notre futur mix.

Il y a une « case » jaune/rouge, une rouge, une rouge/bleue, une bleue et une bleue/verte. Sur ces « cases », les joueurs posent les fameuses cartes DropMix. Ces cartes constituent une composante d’une chanson : la piste chant de Closer (The Chainsmokers), les percussions de Short Skirt / Long Jacket (Cake), la guitare de Bring Me To Life (Evanescence)… Chaque carte dispose également d’un « niveau de puissance » et il faut bien sûr faire avec des règles de pose : il faut respecter les couleurs et il est impossible de remplacer une carte par une autre d’un niveau inférieur, en tout cas dans le mode Versus, qui reste le plus intéressant du jeu.

Enfin, DropMix se compose d’une app que l’on télécharge sur Android ou iOS. Oui, il faut disposer d’un smartphone ou d’une tablette relativement récent pour profiter du jeu d’Harmonix. L’app est heureusement gratuite et fonctionne plutôt pas mal. Attention toutefois, un terminal de plus de trois ans a peu de chance de fonctionner et même avec un appareil récent, il faut parfois opérer un reset de la console DropMix pour que l’appairage Bluetooth avec le smartphone se fasse correctement. Les premiers temps c’est un peu contraignant et puis, on finit par s’y faire. Notons de suite qu’il est heureusement possible de conserver la connexion Bluetooth pour relier une enceinte à notre smartphone.

En effet, la console DropMix sert de base pour réaliser les mix, mais c’est l’app de notre smartphone qui effectue ensuite les réglages pour réellement aboutir au mix. De plus, c’est encore elle qui envoie la piste audio ainsi créée vers un haut-parleur. Il s’agit de base de celui de votre smartphone / tablette, mais – nous parlons tout de même d’un jeu musical – nous vous conseillons vivement de chercher meilleure alternative. Deux choix sont alors possibles : exploiter la prise casque de votre appareil pour relier un périphérique ou exploiter le Bluetooth puisqu’il reste possible de l’utiliser malgré l’appairage avec la console DropMix.

Mix'n'match

Une fois l’app DropMix installée, la console DropMix appairée et les cartes déballées, il est possible de se lancer à la découverte du jeu. Trois modes sont disponibles. Freestyle permet tout simplement de créer des mix en plaçant les cartes sur la console sans aucune contrainte, c’est une sorte de bac à sable fait pour découvrir et se détendre. Le mode Équipe est une sorte de jeu en coopératif où tous les joueurs œuvrent vers un but commun : réaliser le meilleur score possible. Sans doute le mode le moins intéressant, il ne permet ni de vraiment rigoler, ni de se surpasser, ni de passer un moment agréable à mixer tranquille. En revanche, il offre un instant découverte agréable.

Le troisième mode est le plus intéressant et la raison d’être de DropMix. Le Clash invite 2 à 4 joueurs à jouer en 1vs.1, 1vs.2 ou 2vs.2 avec un total de 15 à 30 cartes chacun en fonction de la configuration. Une fois les cartes posées sous forme de paquets sur le plateau, la partie peut commencer : c’est l’app qui donne le départ et détermine qui est premier joueur. Celui-ci pioche 5 cartes de son paquet personnel et dispose alors de 2 actions. Il peut placer une carte sur une des cases de la console (1 point d’action) ou appuyer sur le bouton DropMix de la console (1 point d’action) pour imposer le retrait de certaines cartes de la console.

Les règles de pose évoquées précédemment imposent une (toute relative) stratégie. Est-il préférable de placer d’abord une carte de faible niveau ? Vaut-il mieux essayer de remplir toutes les couleurs le plus vite possible afin de priver l’autre joueur d’éventuels bonus ? Sachez effectivement qu’une partie de DropMix se joue en 15 ou 21 points. Le premier à atteindre ce score remporte la manche. On marque 1 point en posant une carte et 1 point bonus si la couleur n’est pas encore présente dans le mix. D’autres bonus peuvent aussi intervenir lorsque l’on pose des cartes noir et blanc ou que les 5 pistes de la console sont sous notre « contrôle ».

Recouvrir la carte de l’adversaire ne lui retire en revanche aucun point alors qu’appuyer sur la touche DropMix vient considérablement changer la donne. Une telle pression lance une roulette qui vient décider – au hasard – quel(s) niveau(x) de cartes il faut retirer de la console. On retire alors toutes les cartes concernées, peu importe le joueur à qui elles appartiennent : mais seul l’adversaire perd des points. De plus, retirer des cartes peut parfois aboutir au « nettoyage » complet d’une « case » de la console. L’intérêt est alors, bien sûr, de pouvoir ajouter des couleurs absentes plus facilement et obtenir quelques points bonus.

Brouillon de mixage

La première partie est forcément un peu brouillon dans la mesure où on ne maîtrise pas encore bien les enchaînements, les combos et les pouvoirs des (puissantes) cartes noir et blanc. Dès la seconde partie en revanche, on pose davantage son jeu, on réfléchit aux implications de nos actions… un peu trop même. En effet, on se rend vite compte que la stratégie que l’on peut déployer est en réalité très limitée. DropMix est un jeu « apéritif » : on profite de quelques minutes de temps libre entre en amis au cours d’une soirée, on sort DropMix, on balance quelques cartes et on profite de mix originaux qui mettent la bonne humeur.

Enfin… en théorie. En effet, il faut faire avec deux autres contraintes majeurs. Les premières minutes, on est bluffés par les productions musicales auxquelles aboutit l’app DropMix. C’est vrai, on mélange du Cake, du Bruno Mars et du LMFAO, mais DropMix parvient à en faire quelque chose. Chaque couleur correspond effectivement à un élément musical : jaune pour les voix, rouge pour les harmonies, bleu pour la rythmique et vert pour les basses. Forcément, plaquer la voix d’Ed Sheeran (Sing) sur la rythmique de The Final Countdown (Europe) a quelque chose d’assez stupéfiant… au moins au cours des premières parties.

En effet, dès lors que l’on commence à enchaîner les parties, on se rend compte que certaines pistes l’emportent nettement sur les autres et les mix obtenus sont inégaux. Ce n’est pas une surprise, mais les « millions de combinaisons possibles » constituent surtout un argument commercial : une majorité ressemble à une bouillie sans aucun intérêt. Pour le reste et aboutir à ces nombreuses combinaisons, il est indispensable de ne pas se limiter aux 60 cartes qui accompagnent de base la planche DropMix. Il nous faut aussi évoquer le côté cartes à collectionner du jeu d’Harmonix. Le studio a effectivement prévu de multiples « packs » pour agrémenter notre discothèque.

Pour la « Saison 1 », Harmonix a sorti 300 cartes réparties en 20 séries. Il y a 5 séries pop, 5 hip-hop / rap / R&B, 4 rock, 4 dance / électronique et 2 country. La console DropMix est livrée avec un set de chacune des quatre premières catégories et les autres s’achètent au moyen de deux types de packs : les playlists qui contiennent l’intégralité d’une série et les discovery qui ne contiennent que 5 cartes appartenant à 2 ou 3 séries. Harmonix s’est arrangé pour qu’il n’y ait jamais de doublon entre les packs, à condition de ne pas commander les discovery packs en ligne : il faut regarder la pochette pour savoir quel pack on achète et, ainsi, ne pas en avoir en double.

Pompe à fric

Là où les choses deviennent tout de suite moins sympa, c’est que pour profiter au mieux de DropMix, il est largement préférable de disposer d’un maximum de cartes. Avec les 60 cartes de base, vous allez rapidement faire le tour des possibilités d’autant qu’il y a forcément des séries qui vous plairont nettement moins que d’autres. Les packs playlist coûtent 15€ pièce et les packs discovery sont facturés 5€. Grosso modo, une carte coûte donc 1€ et l’intégralité de la « Saison 1 » revient donc à 130€ pour la console plus 240€ pour l’ensemble des 240 autres cartes… Oui, vous vous en sortirez pour 370€ si vous souhaitez l’intégralité du set DropMix.

Vous me direz, si vous n’aimez pas la dance ou l’électro, vous pouvez sans doute faire l’impasse sur toutes les cartes correspondantes. Ce n’est pas tout à fait vrai dans la mesure où les mix profitent tout de même de cette variété des instrumentations. En effet, chacune des chansons mises en avant par Harmonix est « découpée ». Ainsi, les cuivres de Short Skirt / Long Jacket ainsi que les percussions constituent 2 cartes de la série Blade, tandis que le chant et la ligne de basse sont sur 2 cartes de la série Hightower. Pire le Bring Me To Life d’Evanescence est éclatée sur 3 séries. Le but est bien sûr de forcer les joueurs à dépenser pour jouer avec toutes les composantes de leurs morceaux préférés.

Plus gênant, la sélection proposée pour cette « Saison 1 » est finalement famélique. Seulement 59 chansons sont ainsi présentes pour autant d’artistes ! Harmonix ne pouvait évidemment pas proposer des milliers de chansons, mais le résultat est malgré tout décevant… surtout pour la somme engagée. Somme qui d’ailleurs ne permet même pas de profiter des morceaux dans leur intégralité. Non, nous avons fait le test sur quelques pistes : on peut grosso modo compter sur 60-80 secondes de chacun des morceaux avant que DropMix ne procède à une jolie boucle. Il le fait astucieusement, mais la coupure fait quand même mal au cœur.

Ne forçons toutefois pas le trait, car les mix proposés par le logiciel sont réussis et nous apprécions notamment la manière dont DropMix parvient à gérer les différences de rythmes. Les cartes de plus haut niveau semblent l’emporter sur les autres et ainsi entendre le I Will Survive de Gloria Gaynor ralenti par Disturbed (Down With The Sickness) est troublant. Hélas, le principe même du mode Clash ne permet pas toujours de profiter de combinaisons musicalement intéressantes : en effet, l’objectif des joueurs va contre l’idée même de composer des mix que l’on va trouver satisfaisant, le but est d’arriver le premier à 21 points et peu importe si tout cela se transforme en bouillie d’instruments.

Terminons en évoquant divers bugs. Les cartes semblent contenir une puce RFID pour que la console les détecte. Cela marche bien, mais les amateurs de sleeves prendront des ultra-fines pour que la console continue à les identifier, surtout avec des piles de 7 ou 8 cartes. Problème aussi avec l’appairage de la console qui nécessite quelques reset. Problème encore avec le Bluetooth : il est conseillé de connecter d’abord la console et ensuite votre enceinte Bluetooth. Enfin, la batterie du smartphone est lourdement sollicitée et dommage que la console – elle fonctionne à pile – ne puisse servir de centrale pour recharger le portable.

Conclusion

Il ne faut que quelques secondes pour être conquis par le concept de DropMix. Associer différents éléments de chansons radicalement hétérogènes est jubilatoire. L’application DropMix effectue un travail intéressant pour que l’ensemble reste cohérent. Hélas, la réalisation et le modèle économique sont plus que discutables. Quantité de combinaisons aboutissent à une espèce de brouillon de mix peu flatteur. Le concept de Clash – le mode le plus intéressant – oriente les joueurs vers une course aux points incompatible avec des mix de qualité. Mais, vous vous en doutez, c’est la sélection de 59 chansons et le modèle économique qui pousse à dépenser près de 400 euros qui nous attristent. Surtout que les chansons ne sont que des extraits ! Nous adhérons au concept, mais ne pouvons cautionner son application pratique. Dommage.