Rencontre avec Morgan Spurlock, Mr “Super Size me”
Morgan Spurlock est un acteur et réalisateur américain, notamment connu pour son film Super Size Me. Il a répondu à nos questions.
L’interview a été réalisée en présence de Morgan Spurlock et Jeremy Chilnick lors du Comic Con’ Paris 2013.
Vous êtes ici pour présenter “Comic Con, Episode IV : A Fan’s Hope”. D’où vous vient l’idée de réaliser un tel documentaire ?
En 2009, nous avons été embauchés par la Fox pour réaliser une émission spéciale sur les Simpsons, à l’occasion des 20 ans de la série. Pendant le tournage, j’ai réalisé que je devais aller au Comic Con’. Je n’y suis jamais allé auparavant et j’en avais toujours eu l’envie. L’occasion se présentant enfin, j’en ai profité.
L’un des objectifs était aussi de rencontrer des superfans et de les comprendre. Pour cette raison, le Comic Con de San Diego était “the place to go”. Une fois sur place, nous avons commencé à interviewer les fans sur pourquoi ils aimaient les Simpsons, sur ce qu’étaient Marge et Homer pour eux… En étant là, j’ai commencé à comprendre combien les fans étaient passionnés, portant des costumes, possédant des objets collectors…
Lors de la première soirée où nous étions au Comic Con’, j’ai rencontré Stan Lee. Étant un très grand fan de monsieur Lee, les comics de ce dernier m’ayant poussé à devenir une personne “créative”, je l’ai abordé en lui disant “Monsieur Lee, vous avez changé ma vie lorsque j’étais encore un enfant, je veux vous remercier pour cela”.
La réaction de Stan Lee fut alors de m’inviter à faire un documentaire parlant du Comic Con’. Ce que je me suis empressé d’accepter. S’ensuivirent plusieurs rencontres avec différentes personnalités qui me conduisirent à réunir toutes les personnes qu’il me fallait pour réaliser ce fameux documentaire.
Comment était-ce de travailler avec de telles icônes de la culture geek ?
C’était incroyable. Ces personnes, je les admire et respecte beaucoup. S’entretenir avec eux, les analyser et bénéficier de leurs avis et conseils était formidable.
Votre film nous fait comprendre que le Comic Con’ attire de vrais passionnés de comics, film ou même jeux vidéo et émissions télévisées. Qu’est-ce qui transforme les gens en “über-fans” ?
(Jeremy Chilnick prend la parole) : Quelque chose s’est passé. La culture semble avoir évolué. Aujourd’hui, grâce au web et aux nouveaux moyens de communication, l’on peut aisément entrer en communication avec d’autres gens partageant nos passions et partager nos propres passions, les mettre en avant auprès des autres.
Le Comic Con’ était l’unique endroit où l’on pouvait faire cela auparavant. Maintenant, les gens sont au courant de cette culture, de ces passions et cela est devenu mainstream.
(Spurlock reprend la parole) : Pendant une longue période, les comics et autres récits fantastiques étaient réservés aux geeks, aux nerds. C’était des sujets de moqueries et il valait mieux ne pas mettre en avant ce genre de passion.
Mais aujourd’hui, cela est devenu “cool” d’être ainsi, “cool” d’être geek, d’aimer Iron Man. Quand j’étais gosse, il y a de cela une vingtaine d’années, dire qu’on aimait Iron Man pouvait pousser les gens à vous frapper. Aujourd’hui ce n’est définitivement plus le cas.
Petite parenthèse de Spurlock au sujet d’un adolescent qui l’a remercié d’avoir fait le documentaire sur le Comic Con’. Les parents de ce dernier pensaient en effet qu’il était bizarre et ne comprenaient pas sa passion. Après qu’ils aient visionné le documentaire, la vision qu’ils avaient de leur fils a changé et ils l’ont enfin compris.
Spurlock espère que son film va réconcilier les geeks et non-geeks, créant ainsi une relation harmonieuse entre eux.
Vous définiriez-vous comme étant un fan ?
Les deux répondent qu’ils sont absolument geeks.
Comment et où avez-vous trouvé les personnes sur lesquelles vous vous focalisez durant le film ?
Nous avons mis en place un avis de recherche de fans prêt à dévoiler leurs passions pour le documentaire. Nous avons ainsi obtenu plus de 3000 réponses.
Depuis le tournage, j’ai revu plusieurs de ces fans, notamment lors du Comic Con l’an dernier. Certaines de ces personnes ont bénéficié d’une mise en avant grâce au documentaire, ainsi une fille est devenue l’assistante du réalisateur de Old Boy, Park Chan-Wook.
Beaucoup d’entre eux ont été placés sous le feu des projecteurs, comme Holly Conrad, qui est depuis actrice et a participé à plusieurs films. Eric Henson a quant à lui pu faire découvrir au monde ses talents de dessinateur de comics et est depuis très demandé.
Dans ce documentaire, on a l’impression que le mercantilisme est exprimé d’un point de vue différent que dans vos précédents films. Pensez-vous qu’il y ait un bon côté du mercantilisme ?
Dans le documentaire, les idées et pratiques des studios et autres réseaux de distribution de comics sont évoquées. Pour eux, les fans présents au Comic Con’ sont une manne financière sur lequel il faut se capitaliser afin de faire un maximum de bénéfice.
Ils ont conscience que s’ils arrivent à satisfaire ces fans, alors ces derniers vont leur rester loyal.
Que pensez-vous du Comic Con’ français ?
Je m’y suis promené et y ai même dépensé une centaine d’euros. Même si la langue des comics et des fans est différente, le concept reste le même, et l’état d’esprit qui y règne est à l’égal de celui qu’il y a à San Diego lors du Comic Con.
Il semble que désormais, peu importe où l’on va dans le monde, les geeks sont partout.
Vous avez aujourd’hui présenté le documentaire au public français, quelles ont été les réactions ?
Les personnes présentes ont trouvé que le documentaire justifié à lui seul leur raison d’être.
Parlons maintenant de votre film renommé “Super Size Me”. Mais avant, pouvez-vous nous rappeler la situation actuelle de l’obésité aux États-Unis ?
L’obésité en Amérique progresse. Les gens ne cessent de grossir chaque jour. Le film Super Size Me a peut-être eu un impact sur certains, mais beaucoup d’autres continuent de faire de mauvais choix en consommant des produits qui ont un mauvais impact sur leur vie. Ils ne font pas encore le lien entre leur régime alimentaire et les problèmes de santé qui en découlent.
Cependant je garde espoir, imaginant que dans le futur les gens vont prendre conscience de leurs mauvais choix et évoluer.
(Jeremy Chilnick prend la parole) : Il est aujourd’hui plus facile de manger sainement qu’auparavant. Les réseaux de distribution ont pris conscience qu’ils se devaient de proposer une alternative prétendument saine à leurs consommateurs.
(Spurlock reprend la parole) : En effet, avant Super Size Me il était difficile de trouver une salade dans un fast-food. Maintenant, il y a des salades, mais aussi des fruits.
Nous avons constaté durant le film une évolution importante de votre état de santé. Comment s’est passé votre récupération après cela ? Y a-t-il eu des effets secondaires (physiques ou moraux) ?
Il m’a fallu des mois pour récupérer, s’habituer à un régime alimentaire normal, retrouver une pression sanguine correcte. J’ai dû attendre quasiment un an avant de retrouver mon poids d’avant Super Size Me.
Cependant, même en perdant la graisse accumulée, les cellules graisseuses restent et attendent patiemment que vous mangiez trop gras. Ainsi après mon régime, je pouvais reprendre 3 à 5 kilos en une semaine à cause d’une alimentation trop riche. Dès que je mangeais trop, mon corps stockait la graisse au lieu de l’évacuer et je reprenais du poids.
Continuez-vous encore aujourd’hui à fréquenter des fast-foods ?
Je ne suis pas retourné dans un fast-food depuis plusieurs années, leur nourriture est trop mauvaise.
Votre film a-t-il influencé des gens ? Certaines chaînes de fast-foods ont-elles réagi ?
Mon film a influencé beaucoup de gens de par le monde, changeant leur regard vis-à-vis de ce qu’ils mangent. Je connais des professeurs montrant son film à des élèves, des docteurs le souscrivant à des patients. C’est génial !
Les enfants qui regardent mon film sont la plupart du temps dégoûté de la junk-food et n’osent plus ensuite y toucher. Les chaînes de fast-food ont étrangement fait évoluer leurs menus après le succès rencontré par Super Size Me. Elles ont cependant nié que cela soit dû au film.
Vous travaillez aujourd’hui sur “Mansome”. Pouvez-vous nous en dire plus ?
Le titre du film, Mansome, retranscrit le fait que si vous êtes un homme et que vous êtes beau, vous êtes Mansome. Ce film est une réflexion sur ce que c’est d’être un homme dans le monde aujourd’hui.
(Spurlock fait alors une parenthèse sur sa moustache, nous expliquant qu’il se rase ainsi suite à un pari qu’il a perdu. Ce pari lui imposait qu’en cas de défaite, il se rase à la manière d’un acteur de film pornographique.)
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Merci à @ka0nashi et @Slyveryth d’avoir recueilli les propos de Morgan Spurlock et Jeremy Chilnick.
- Vous êtes ici pour présenter “Comic Con, Episode IV : A Fan’s Hope”. D’où vous vient l’idée de réaliser un tel documentaire ?
- Comment était-ce de travailler avec de telles icônes de la culture geek ?
- Votre film nous fait comprendre que le Comic Con’ attire de vrais passionnés de comics, film ou même jeux vidéo et émissions télévisées. Qu’est-ce qui transforme les gens en “über-fans” ?
- Vous définiriez-vous comme étant un fan ?
- Comment et où avez-vous trouvé les personnes sur lesquelles vous vous focalisez durant le film ?
- Dans ce documentaire, on a l’impression que le mercantilisme est exprimé d’un point de vue différent que dans vos précédents films. Pensez-vous qu’il y ait un bon côté du mercantilisme ?
- Que pensez-vous du Comic Con’ français ?
- Vous avez aujourd’hui présenté le documentaire au public français, quelles ont été les réactions ?
- Parlons maintenant de votre film renommé “Super Size Me”. Mais avant, pouvez-vous nous rappeler la situation actuelle de l’obésité aux États-Unis ?
- Nous avons constaté durant le film une évolution importante de votre état de santé. Comment s’est passé votre récupération après cela ? Y a-t-il eu des effets secondaires (physiques ou moraux) ?
- Continuez-vous encore aujourd’hui à fréquenter des fast-foods ?
- Votre film a-t-il influencé des gens ? Certaines chaînes de fast-foods ont-elles réagi ?
- Vous travaillez aujourd’hui sur “Mansome”. Pouvez-vous nous en dire plus ?