Born to Code (or Not) : La Piscine de 42 vécue par les étudiants
Plongée au coeur de la piscine de l'école 42, l'incubateur de génies de l'informatique créé par Xavier Niel.
“42Born2Code”, telle est l’inscription que l’on peut lire sur le bracelet des étudiants de 42, bracelet que je porte encore autour de mon poignet au moment où j’écris. Tel un lien particulier qui nous rattache à une période inscrite pour longtemps dans nos vies, nous les “Piscineux” de 42. Eprouvante mais inoubliable, une chose est certaine : pour raconter la Piscine, il faut l’avoir vécue.
Après un mois passé au sein de cet immense établissement accueillant 1000 Imacs flambants neufs et surtout 2400 “apprentis”, j’ai voulu partager cette expérience hors-du- commun avec les lecteurs de Begeek.fr. Nourri des différents ressentis et témoignages d’autres étudiants, cet article vous permettra de comprendre un peu mieux ce que nous avons vécu.
Fin de la Piscine 42 : petit récap’ de 3 mois particuliers
Des parcours rythmés d’échecs scolaires, d’erreurs d’orientation, de manque de motivation et de divers obstacles, ce n’est pas ce qui manque en France. Des fans de jeux vidéos, des addicts du web et des passionnés de nouvelles technologies non plus. Ce n’est donc ni un simple échec scolaire ni une passion commune pour le langage C qui ont su rassembler 2400 jeunes âgés de 18 à 30 ans au 96 boulevard Bessières (Paris 17e) de juillet à septembre.
Près de 70 000 candidats potentiels se sont inscrits aux tests d’admission à la Piscine. 2400 ont été retenus pour intégrer la seconde phase de sélection de l’école 42 durant un mois : la Piscine de 42. Celle qui depuis plusieurs mois, et tout particulièrement durant le mois de septembre a éveillé tant la curiosité des passants (ne comprenant pas quel était cet amas de jeunes présents au sein et autour de l établissement) que l’intérêt des médias, (eux-mêmes présents régulièrement dans les locaux), et qui vient tout juste de se terminer. Les derniers résultats sont tombés il y a quelques jours. L’école ouvrira ses portes officiellement pour la toute première promotion à la mi-novembre.
De nombreux reportages lui ont été consacrés : presse écrite, sites web, chaines tv nationales et radios se sont intéressés à 42. Chacun y a vu selon les cas : une école pour génies de l’ informatique, une “geek academy”, une seconde chance pour apprendre un métier, un incubateur pour surdoués ou encore une usine visant à créer des machines à coder. Mais qu’en était-il vraiment ? Le mieux fut encore de le demander aux principaux acteurs, ceux qui l’ont vécue et qui l’ont faite vivre pendant ces trois derniers mois.
Pourquoi 42 ?
Pour changer le monde, révolutionner l’univers et le numérique, développer de nouvelles technologies, concrétiser ses projets, terminer ce que l’on a commencé, rencontrer des personnes qui nous ressemblent ou complètement différentes, vivre une expérience unique, apprendre un nouveau langage, changer de vie ou tout simplement pour voir ce que ça donne…?
- Il y a ceux qui sont venus avec leur projet en tête, à peine ou à moitié réalisé, dans le but d’acquérir les compétences nécessaires pour le mettre sur pied.
- Il y a ceux qui rêvent de créer des startups florissantes et ceux qui sont déjà entrepreneurs.
- Il y a aussi ceux qui sont tombés dans le code tout petit et qui ont vu en 42 l’occasion d y revenir, en se disant “pourquoi pas ?” : les rêves de gosse sont souvent les bons. Comme la première intuition.
- Il y a ceux qui ne savent pas vraiment pourquoi ils sont venus mais qui y ont trouvé une bonne raison de rester.
- Il y a ceux qui s’y sont révélés, et à qui la piscine a apporté bien plus qu’une phase de sélection pour entrer dans une école d’informatique.
Le sentiment d’être au bon endroit, au bon moment. Avec les bonnes personnes. Même si certains sont restés isolés et leur séjour a du y être plus difficile. Malgré tout ils sont restés, se sont accrochés. Ne pas se noyer : c’est aussi ça, la Piscine.
“Pourquoi 42 ? C’est la question que j’ai posé à tout le monde. Pour ma part, ce fut un concours de circonstances. Co-fondatrice d’une agence de communication (Com’In BACK), et venant du milieu de l’évènementiel, j’avais besoin de nouvelles compétences pour développer un certain nombre de projets. Je suis tombée sur un article annonçant la création d’une école ouverte à tous et dans laquelle j’ai tout de suite vu une solution.
Bien que non admise, je n’ai pas regretté mon choix : j’ai bel et bien trouvé les compétences dont j’avais besoin…pas en moi, mais à travers les personnes que j’ai rencontrées et avec qui j’ai créé un réseau. J’aurai pu simplement noter quelques numéros et partir : il faut être lucide, le code et la programmation ne sont pas faits pour moi. Autodidacte, j’ai cependant été séduite par le concept pédagogique et j’aurai rêvé qu’il existe de telles structures dans les domaines qui me passionnent (la communication, la psychologie, la radio et l’audiovisuel).
Je pense que malgré tout, j’ai trouvé ma place au sein de la piscine. J’ai favorisé l’esprit collaboratif en créant des liens, invitant ceux qui avaient de l’avance à expliquer à ceux qui galéraient dans leur coin et surtout en essayant de soutenir au maximum les personnes qui avaient le potentiel d’y arriver. Rebooster les autres et tenter de leur redonner le moral : au fond, c’était aussi une bonne raison d’être là ! “
Elodie-Léah, Piscine de Septembre
“J’ai fait un bac L car mes résultats ne me permettaient pas de faire une autre série générale. Je n’avais pas d’envie particulière jusqu’en terminale, où j’ai découvert le domaine du jeu vidéo. J’ai voulu donc m’y diriger mais j’ai échoué à un concours pour une école spécialisée. Mes grands parents ont lu dans Le Parisien un article sur l’école 42, et je me suis donc inscrite en ligne. Je ne pensais pas réussir à aller jusqu’à la piscine. J’ai fait la piscine de juillet, au cas où je ne serais pas prise, afin d’aller en IUT, même si je n’en avais pas vraiment envie. Une fois dans le concours, je me suis aperçue que c’était exactement ce qu’il me fallait comme école.
J’ai tout donné pendant la première semaine, dînant parfois à 23H, afin de rester au maximum pour travailler. Je n’avais aucune notion de code avant, j’ai eu beaucoup de mal tout au long de la piscine mais je n’ai rien lâché. Au final, cela a payé et me voilà donc prise.”
Melissa, Piscine de Juillet
Peer-to-peer : pour le meilleur et pour le pire
La Piscine de 42 fut un lieu en constante ébullition, et bien au-delà de l’apprentissage du code. L’aspect humain et social de ce grand rendez-vous “en terre inconnue” fut l’élément le plus fascinant. Le soutien, la solidarité, la diversité, l’échange, le partage et les tensions (forcément ce ne fut pas non plus le monde des Bisounours tous les jours), restent la base de la Piscine, sans quoi elle ne serait qu’une période d’essai à l’apprentissage de la programmation somme toute banale. Comme partout, les différences peuvent être des freins mais il est intéressant d’observer comment un groupe de personnes à forte majorité autodidactes et de nature indépendante se sont confrontés les uns aux autres.
42 m’a énormément apporté sur le plan humain, cela m’a permis de voir que des gens savaient encore quelles étaient les vraies valeurs humaines, que des gens pouvaient partager sans même tellement se connaître, que ce soit le savoir, un matelas ou de la nourriture.
De plus, 42 permet de se faire un réseau important de gens complètement différents les uns des autres. Des gens provenant de toute classe sociale, toute ethnie et ayant chacun sa façon de penser, tous reliés par la même graine de folie qui les font regarder vers l’avenir. On s’enrichit des différentes expériences de vie et on gagne un grand carnet d’adresses. On s’y fait des amis très proches, surtout après avoir passé un mois ensemble 24h/24, c’est quelque chose qu’il faut avoir vécu pour le comprendre…
Zach, Piscine de Septembre
Le “Pire-tout-Pire”, c’est le fondement de la pédagogie ici à 42. Le principe est de laisser chaque étudiant apprendre par lui-même, mais surtout apprendre grâce à ses échanges avec les autres. Autant en qualité d’enseignant, qu’en qualité d’étudiant. Il n’y a que des instructions basiques et parfois expressément erronées dans les cours en vidéo que nous avons chaque jour sur notre tableau de bord.
Ce qui signifie qu’il faut non seulement qu’on cherche un peu par nous-même, qu’on teste, qu’on fasse des erreurs, qu’on apprenne de ses erreurs, mais aussi qu’on aille déranger nos collègues pour leur demander de nous aider, et qu’on accepte aussi d’accompagner quelqu’un pour l’aider à assimiler quelque chose qu’on a bien compris et qui n’est pas encore acquis pour lui ou elle. Et inversement. Vous m’suivez ?
Adrien, Piscine de Septembre
Pourquoi “eux” ?
Lorsque l’on pense geek, on pense immédiatement à un type, ou plutôt stéréotype, de personne en particulier. C est vrai, il y eut dans la Piscine de 42 des gamers introvertis, des personnalités ayant leur propre univers, des addicts de jeux de rôle et de vrais génies.
TO BE GEEK OR NOT TO BE : N’EST PAS GEEK CELUI QUE L’ON CROIT
Mais en réalité, on est tous le geek de quelqu’un d’autre. Si votre grand-mère ne sait pas se servir d’un téléphone portable et que vous arrivez à changer son fond d’écran, il y a de fortes chances pour qu’elle parle de vous comme étant un petit prodige des nouvelles technologies. En creusant, on se rend rapidement compte que ce qui nous rassembla ici fut tout autre, c’est à la fois un point en commun et une différence. Une manière de penser, de réagir et l’envie d’apprendre. D’apprendre à apprendre. Ce qu’on vous demande, mais aussi sur soi, et sur les autres.
Je ne me considère pas comme un geek, je suis plutôt un nerd, étant passionné de technologies et d’informatique. Je pense que notre point commun à tous est le fait que l’on ait envie d’apprendre, qu’on soit passionné par ce qu’on fait, mais aussi qu’on ait le sens du partage, de l’entraide, une intelligence généralement élevée et une force intérieure. Il faut être fort mentalement pour résister à la pression et continuer ! Nous sommes libres et autonomes : c’est d’ailleurs là où l’école a tout compris. Avoir son bac ne signifie pas être un génie, se ruiner pour une école ne signifie pas non plus qu’on réussira. A 42, on ne nous force pas à travailler, c’est à nous de gérer. Ce n’est pas le savoir qui vient à nous, mais nous qui allons le chercher. Et c’est justement ça qui est stimulant.
Jerem, Piscine de Septembre, Genève
L’école est systématiquement présentée comme étant “l’école des geeks” par les médias, ce qui est totalement faux, surtout si on prend en compte leur définition erronée et extrêmement péjorative du terme. Je ne me considère pas comme un geek, et la plupart des gens qui m’entouraient n’en avaient rien non plus. Alors bien sûr, il doit y avoir, mettons un bon tiers de geeks sur chaque promo, cadre informatique oblige, mais il y avait de tout. Des néophytes de 30 piges, des mecs déscolarisés depuis 5 ans, des filles aux rêves déchus faute de moyens qui sont plus là pour le concept de l’école que pour la vibe geek…
Louinis, Piscine d’Août
Une expérience unique
Il est difficile de se rendre compte de ce qui se passe à l’intérieur de 42. Chacun a vécu cette expérience unique, il faut le dire, différemment. Certains l’ont comparé l’enfermement et la cohabitation permanente comme ce qu’ont pu vivre des candidats d’émissions de télé-réalité (la pression et le travail en plus), d’autres une grande colo avec plein de potes ou encore un lieu d’expérimentation. Car on nous a testé et ce, au-delà de nos connaissances et savoir-faire respectifs en matière de programmation. Malgré la pression, malgré la fatigue et la promiscuité envahissante, il y a “quelque chose” qui nous retenait. Nombreux sont ceux qui ont pensé à partir mais qui sont finalement restés. Dépasser ses propres limites, quelles qu’elles soient, fut l’un des principaux leitmotivs de chacun.
Quelle que soit l’issue de ce concours hors du commun, j’ai vécu l’une des plus intenses, des plus riches, des plus surprenantes et des plus amusantes expériences de ma vie ! Je remercie tous les intervenants proches ou lointains qui ont rendu cette aventure réelle, mes parents, mes amis du plat pays, tous les membres du staff, les créateurs et initiateurs de cette merveilleuse idée, les étudiants avec qui j’ai pu partager, tous ceux que j’ai croisé ici ou là, merci merci merci !
Adrien
Une expérience unique, avec des points positifs comme négatifs mais hyper enrichissante d’un point de vue humain : vivre avec 700 personnes, rencontrer des gens, confronter ses influences, ses univers, avec des gens riches par leur diversité, leur parcours, et même la façon avec laquelle ils vivent eux-même cette expérience.) ou même personnel (découvrir et éprouver ses limites, en terme de quantité de travail fourni, d’assiduité, de persévérance, de physique (clim, poussière, malbouffe, néons).
Au niveau de la méthode peer to peer, je n’ai jamais appris autant de choses en partant de rien que dans cette école. Cette méthode d’apprentissage devrait être étudiée et adaptée au plus grand nombre, à partir du collège minimum. C’est une Super expérience qui me servira toute ma vie.
Titouan, Piscine de Septembre
Pourquoi nous ? Pourquoi eux ?
En quoi consistaient réellement les tests passés en ligne ? Tests de logique, tests de persévérance, tests de Q.I. ? Et surtout : quels sont les véritables critères de sélection ? A l’heure où les résultats finaux sont tombés, le doute et le mystère planent toujours. Inutile de demander directement au staff ou à la direction, c’est le but et c’est compréhensible.
Il y a eut comme vous le savez sûrement, plusieurs étapes de sélection. La première consistait à résoudre des “problèmes” que d’autres appelleront des jeux ou des tests de logique en ligne. La seconde fut la fameuse Piscine. Durant celle-ci, l’une des questions qui fit émerger le plus grand nombre de théories, de pronostics, voire parfois de diagnostics et même de délires paranoïaques, fut : Pourquoi nous ? Pourquoi eux ? Pourquoi sommes-nous ici ? Pourquoi ceux-là ont été admis ?
Cependant, à force d’en discuter, plusieurs points sont revenus régulièrement. Partant du principe que le système de l’école est basé sur une méritocratie et des conditions d’entreprise, on dégage tout de suite l’idée qu’il suffit d’être simplement un crack en langage C (le langage de programmation sur lequel nous avons travaillé pendant la Piscine).
Mon frère jumeau, Lassana, et moi-même avons tous deux intégré la Piscine du mois de septembre. J’ai été admis mais pas lui. Difficile de savoir quels étaient les critères de sélection, et surtout ce qui a fait la différence entre nous deux. Mon frère bossait beaucoup, moi aussi mais je bougeais plus, je communiquais davantage avec le staff. Cependant, pas sûr qu’ils aient su nous reconnaître, d’ailleurs ils me demandaient souvent mon prénom…! J’étais de nuit, mon frère de jour. Je pense que la nuit, on a plus l’occasion de se détendre, de discuter et de rigoler avec tout le monde, même si on est là pour bosser. Je dirais qu’ils ont favorisé l’aspect “peer-to-peer”, c’est la base.
Foussene, Piscine de Septembre
Je pense qu’ils sélectionnent les candidats sur des critères précis et se basent surtout sur le profil de chacun. Comme le but est de former des personnes compétentes en entreprise et que dans une entreprise, le savoir-faire et l’expertise ne suffisent pas, je pense qu’ils nous ont observés au maximum dans notre comportement, nos relations, que ce soit à travers les travaux de groupe, les notations, dans l’école, avec le staff… C’est vrai qu’à force de se poser ce type de questions on en devient parano mais c’est marrant de se dire que rien n’est fait au hasard…
Lauriane, Piscine de Septembre
Et enfin : pourquoi pas ? Les étudiants répondent aux critiques
Suite à certains articles et reportages au sujet de l’école, notamment sur le web, il est ressorti clairement que les avis étaient partagés concernant le concept même de l’école et l’initiative financière de Xavier Niel et pédagogique de la Direction (Nicolas Sadirac, Kwame, Florian..). Des étudiants ont souhaité y répondre et apporter leurs éléments de réponse :
Beaucoup d’encre a coulé sur notre école dernièrement.
Certaines critiques étaient positives, d’autres négatives. C’est le droit de chacun de se forger sa propre opinion, mais nous pensons qu’il serait judicieux d’apporter certaines rectifications ou précisions, car nous ne nous sommes pas toujours retrouvés dans les propos de certains médias (l’emploi même du terme “programmateur” au lieu de “programmeur” nous permet de constater une certains ignorance de leur part!)
Certains doutaient du sérieux de la formation, d’autres ont estimé que les élèves n’étaient pas respectés ou étaient carrément lésés. D’autres encore nous ont donné dans leurs articles un côté “bêtes curieuses”.
Il est vrai que 42 ne dispensera pas de cours de physique, de chimie ou de maths comme le ferait toute école d’ingénieur digne de ce nom. Mais c’est mieux ainsi, car le but de cette école n’est pas de former des ingénieurs. Les profs en cursus d’ingénieur nous le répétaient souvent : “Un ingénieur n’est pas forcément une personne experte dans un domaine, mais a au moins des notions de chaque domaine”. Si nous avons choisi cette école c’est justement que ce profil généraliste ne nous intéressait pas : nous voulions nous concentrer sur un domaine précis, celui de la programmation et des ordinateurs. Cette école ne convient pas à tout le monde, juste à des personnes avides de faire leurs preuves mais n’y parvenant pas dans un système éducatif ne formatant pas à la logique de la programmation et aux métiers du numérique.
Certains arguent que l’absence de diplôme nous empêchera de trouver un travail, ce sera peut-être vrai avec certains employeurs, mais faux avec beaucoup d’autre. La perspective de faire nos études dans une école fondée par un chef d’entreprise tel que Xavier Niel nous permet d’espérer une formation correcte et ADAPTÉE AUX BESOINS DES ENTREPRISES, c’est d’ailleurs un avis partagé par beaucoup de personnes extérieures à l’école et le nombre de ces avis positifs nous encourage à penser en ce sens.
On ne nous a pas menti, on ne nous a pas promis de diplôme mais une formation avec certification à la clé. L’école promet de faire de nous des experts en informatique, il n’a jamais été question de faire de nous des ingénieurs (souvent destinés plus à des rôles de cadres ou de chefs de projets plutôt que des développeurs, même dans le milieu de l’informatique). On nous avais également prévenu : “la piscine sera difficile” – et nous avons été servis!
Nous ne pensons pas avoir été lésés ou arnaqués dans la méthode de travail, ou les prétentions de l’école. La piscine était une épreuve, pas une torture. Le dortoir improvisé n’était pas pour les “squatteurs” une manière de les tester ou du manque de respect ou une dégradation de leurs conditions de vie mais une solution de fortune pour permettre à ceux n’ayant pas de solution de logement pour un mois sur Paris de suivre la piscine.
Enfin sur certains articles jouant sur les particularités de certains, nous ne sommes pas des bêtes de foire, ni des malades mentaux ou asociaux. Oui, certains adoptent un look parfois déroutant, oui, certains sont largement plus passionnés d’informatique et de jeux vidéos que la moyenne, mais non, nous ne sommes pas anormaux ou no-life, c’est parce que cette école donne sa chance à tous que l’on se retrouve avec des profils aussi variés, qui font justement notre richesse. Le duoquadragintien est un étudiant comme un autre, avec deux bras, deux jambes une tête parfaitement apte à penser et une capacité de jugement.
Vastel, Piscine d’Août.
42 est une opportunité, un tremplin, un ascenseur. C’est aussi un énorme vivier de talents, tous concentrés au même endroit. Plusieurs groupes de travail, projets et collaborations y sont déjà nés ! Je suis déjà gérant de ma propre entreprise (Technologies et Solutions – http://www.technologiesetsolutions.com/), spécialisée dans le développement sous WinDev. Je compte à la fois développer mes propres compétences en programmation et dénicher des personnes compétentes et motivées pour bosser avec moi par la suite. Le diplôme n’a pas d’importance, ce sont des gens compétents et passionnés qu’on recherche.
Guillaume, Piscine de Septembre
Il faut savoir qu’un autre des points mis souvent en avant par les journalistes était l’insalubrité des lieux. Toujours de manière quasi-subtile genre “Je vais mentionner les rumeurs sur l’état des lieux soi-disant objectivement et mettre des shoots de pieds sales en même pour préconditionner l’opinion de l’audimat”. Bien sûr, trois mois ensemble à squatter, avec 2 – 3 types sans la moindre notion d’hygiène, ça finit par craindre un peu. Mais ce qu’il faut savoir c’est que c’était largement minoritaire, et surtout que c’était inhérent au squat improvisé pour faciliter la vie aux non-parisiens. Tout cela plus l’ambiance d’internat que ça a crée, voila de quoi inverses un soi-disant point négatif.
Les médias se faisaient plaisir à filmer toujours les mêmes gueules, que ce soit les trucs un peu hors-du-commun (Le moine bouddhiste -mec super cool au passage-) ou bien l’archétype du no-life total et sa vanne lourde pour nous faire passer pour des cons.
En bref, plus du sensationnalisme que du journalisme. L’esprit du truc n’a pas une seule fois été retranscrit fidèlement dans les médias, chaque plan avait une saveur éditoriale. Si vous voulez des infos précises, je vous redirige sur le blog-journal de certains candidats, par exemple Laurène Castor, lecture sympathique sur les paradigmes d’éducation. C’est à ça que ressemble le duoquadragintien moyen, pas au cliché TF1 de l’associal virtuel.
Louinis, Piscine d’Août
Petit lexique
à l’attention des proches qui ne comprennent plus le langage de leur “Piscineux” après un mois passé à 42 :
- Piscine : A ce stade si vous ne savez pas encore ce qu’est la Piscine, on ne peut rien pour vous.
- Cluster : Salle de travail dans laquelle sont alignés des macs en série. C’est là que tout se passe.
- Bocal : Salle où se regroupe le staff. Sur la porte est inscrit : “Vos problèmes nous intéressent, pas vous”. Porte à ne pas franchir sans une bonne raison.
- Troll : Pertubateur. Toute forme de troll est admise à 42 (ou presque): envoyer le générique de “Petit Poney” dans le casque du voisin, traduire l’espace de travail de l’un en japonais, afficher des images hot sur l’écran de l’autre, attacher un piscineux à un arbre et l’enrouler de cellophane etc…
- Git Clone, Git Add, Git Commit, Git Push : Si à 23h42, votre fils, votre soeur ou votre petit ami se réveille en sursaut en criant : “J’ai oublié de Push!”, rassurez-le, dites-lui que ce n’est qu’un cauchemar et qu’il peut se rendormir.
- 23h42 : L’heure fatidique des rendus quotidiens à 42.
- Colle : Travail à effectuer en groupe. Rien d’extraordinaire jusque là. Reste à trouver les 3 autres membres de son groupe dans un établissement de 4000 m2. Plusieurs solutions sont possibles : mail, téléphone, sms ou tout simplement crier son nom dans chaque cluster jusqu’à ce qu’il se reconnaisse. S’il ne donne pas signe de vie, c’est soit qu’il se douche, soit qu’il dort…soit qu’il s’est déjà noyé et a reçu votre message à quelques centaines de kilomètres de l’école, dans son lit.
- Soutenance : Moment stressant où en principe le moins bon du groupe doit expliquer le pourquoi du comment de l’exercice effectué pendant la Colle à un membre du staff.
- Homeland : Participation volontaire à la surveillance des entrées dans l’école (vérifier que les étudiants “badgent” bien en entrant).
- TIG : Travaux d’Intérêt Général. En général les TIG surviennent brusquement après avoir abusé du SSH (technique de hacking interne pour troller les copains, voir Troll plus haut) ou avoir oublié de passer son badge à l’entrée. Les TIG consistent à participer là encore au bon fonctionnement de l’école (nettoyage des écrans ou des vitres par exemple) pendant une heure ou deux.
- Peer-to-Peer : Si pour une raison quelconque votre Piscineux se sert du prétexte “Peer-to-Peer” pour vous emprunter de l’argent, vider votre paquet de cigarettes, tirer la couette ou quoi que ce soit, ne lui en tenez pas rigueur, c’est un état d’esprit vivement insufflé à l’école, dans le but de favoriser l’échange et le partage d’informations, de connaissances, de matelas et de pièces de 20 centimes (prix du café).
- Dead Zone : Bien que le concept puisse faire métaphoriquement penser à “Marche ou Crève” de Stephen King, la Dead Zone est simplement une pièce isolée…sans caméra. N’y voyez pas une “Love Room” non plus, car comme l’a précisé Sylvain le 1er jour, “tout rapprochement physique avec une ou plusieurs personnes (et soi-même) est strictement interdit”.
- Megatron : Le Mégatron récolte les votes des “nageurs”. Chacun a le droit de voter pour 10 personnes de son choix. Voici un extrait de sa requête : “Je suis Megatron, Leader des Decepticons. Mes informateurs m’ont appris l’existence de personnes hors du commun à 42. Ces surdoués technologiques sont la clé de voute de mon plan de conquête de l’univers. Je compte sur toi pour m’aider à retroucer ces talents. Qui est digne de rejoindre l’équipe finale à 42 ? Tu peux coopter jusqu’à dix de tes camarades anonymement. Choisis bien, tu ne pourras pas modifier ton vote. (…) récompense ceux qui sont les plus à même de porter la pédagogie peer-to-peer à son apogée. “
- Vanessa : Si au réveil il ou elle vous appelle Vanessa en grimaçant, ce n’est ni sa nouvelle conquête, ni un remix de la chanson de Doc Gynéco. C’est simplement le “réveil” brusque et quelque peu militaire annonçant l’heure de nettoyer la salle qui lui servait de dortoir pendant un mois(et le moment de dégager au plus vite).
Le mot de la fin : Il y a des fous qui préparent silencieusement le monde numérique de demain, et parmi ceux-là figurent des étudiants de 42.
Lauriane ITOUA, Piscine de Septembre